Steve Dalachinsky And the Snobs - Ec(H)o - system

Publié le par Esther

Steve Dalachinsky And the Snobs - Ec(H)o - system

Une heure avant d'entrer dans la boutique de Souffle Continu, je n'avais jamais entendu parler ni de Steve Dalachinsky, ni des Snobs. J'avais bien tenté de faire mes petites recherches sur internet, et si j'ai pu trouver quelques renseignements sur Steve Dalachinsky, rien sur les Snobs, à part une flopée de groupes homonymes. Pourtant, the Snobs, groupe parisien officie depuis maintenant une quinzaine d'années. Sous l'étiquette noise rock / rock expérimental. Rien de plus ridicule que ces étiquettes qui vous collent à la peau sans jamais pouvoir vous en départir car bien malin celui qui trouvera l'ombre d'un bout de noise rock dans cet album. Steve Dalachinsky quant à lui, est un poète moderne ancré dans une culture visiblement New-yorkaise habitué à travailler avec la scène Free-jazz (ou rock). En effet, son spoken-word ne peut s'adapter aux codes fondamentaux d'une pop calibrée, ni même à un jazz où la mesure ne dépasse pas d'un métronome. Alors comment aborder une collaboration qui, sur le papier, bien qu'excitante, pouvait en laisser plus d'un sceptique. Ce frêle personnage de 70 balais s'empare du micro, et va, en l'espace de quelques secondes, se transformer en monstre de charisme. Autant vous l'avouer dès maintenant, je ne comprends rien ou presque à l'anglais. Je suis donc le seul dans l'auditoire à rire à côté des blagues, des textes, dont je ne saisis que quelques bribes. En guise de Noise rock, les Snobs nous embarque dans un paysage électronique suranné. A l'heure où les DJ et autres groupes électroniques se cachent derrière leur ordinateur, ils installent patiemment leurs claviers analogiques, leurs jacks, et les patterns des boîtes à rythme brillent de mille feux. Musicalement, on se rapproche plus d'une mélange entre Kraftwerk et l'OMD des premières années que d'un Daft Punk. La salle, aussi petite soit-elle, est captivée par ce conteur alors que la musique, minimaliste en son point de départ, se mêle, se démêle, les sons se croisent, s'anarchisent parfois, pour créer une sorte de bouillon où textes et musiques s'enlacent d'une façon presque sauvage. Après une heure de show, je repars avec le disque sous le bras. Cette production BAM BALAM RECORDS prouve une fois que la résistance s'organise. Certes, non sans mal, mais elle s'organise. ec(H)o – System est un album enthousiasmant à plus d'un titre. D'abord, l'objet, de toute beauté, est fourni avec un livret ce qui n'est pas un luxe. Steve dalachinsky est un poète, un écrivain, et il a des choses à dire et à raconter, et écouter le disque en lisant le texte en même temps au moins une fois me paraît être essentiel pour en comprendre, si ce n'est le sens, au moins l'essence, la quintessence. Pourtant, soyons clairs, je ne comprends pas le texte, mais la musique me parle, dès les premières notes. Une musique électronique abstraite où des sons tombent comme des étoiles d'un ciel où tout s'effondre. Très vite des accords de guitares donne le ton pendant que la boîte à rythmes fait son apparition. Le spoken-word, d'abord noyé sous les échos outranciers a commencé son travail et vous a déjà hypnotisé sans même que vous ne l'ayez remarqué. Vos paupières ne sont pas lourdes, mais votre cerveau s'éteint peu, et se laisse embarquer. Et là, le voyage débute. La voix de Steve Dalachinsky est mixée en avant de sorte que pas un mot ne vous échappe, et « The rape » démarre, sur un BPM digne des boîtes de nuit les plus endiablées. Sauf qu'ici, cette musique ultra répétitive est un décor, un train qui vous mène sur la route d'une destination inconnue en vous donnant l'impression qu'il n'y aura pas de retour, et dès que le saxophone dessine des tableaux d'une abstraction attractive, la course vers le néant semble s'affirmer. Tout s’accélère, se bouscule, se fait mal, car c'est aussi ça la musique, quitter quelques instants son canapé, sous son plaid bien au chaud pour découvrir le monde dans sa plus pure réalité. Le quart d'heure de « the Rape » est une longue ascension orgasmique qui s'achève sur quelques notes bouclées d'un synthétiseur d'un autre âge. La voix atonale, monocorde, et peut-être, pour certains, monotone de Steve Dalachinsky a de quoi désarçonner, mais encore une fois, il s'agit là d'un spoken-word, pas d'une course à la performance vocale. « Pieces of War » semble vouloir apaiser ce volcan sonore avec une piano aux accents jazz, bientôt relayé par des nappes de synthétiseurs d'une beauté et d'une douceur incitant aux rêves. C'est finalement « 2 dead crows » qui va le plus surprendre. En effet, les sonorités utilisées nous replongent au début des années 80, alors que la musique électronique, telle que nous la connaissons aujourd'hui n'en était qu'à ses balbutiements. Le spoken-word a ceci d'avantageux, c'est qu'il permet toutes les formes, aucune contrainte de temps, de rythme, ni même de mesure. Les Snobs répètent les motifs, les agrémentent ensuite, avec des sons toujours plus synthétiques, et toujours plus appuyés. Plus le voyage avance et plus la destination devient floue. Seule la voix reste là inébranlable, y croyant dur comme fer. Les morceaux s'enchaînent sans temps mort laissant l'impression de ce même voyage sans escale, et dont la destination ne semble se dessiner que sur « Mariposa ». En effet, c'est à l'écoute de ce dernier titre que l'on prend enfin conscience de ce qui vient de se dérouler sous nos oreilles incrédules. Si depuis le début, la sensation d'écouter une seule et même chanson pouvait parfois poindre et pourquoi pas laisser certains auditeurs sur l'aire de repos, le voyage s'avère en fait être en mouvement permanent, les motifs se répètent parfois, mais l'espace de quelques instants puis ils disparaissent au profit d'autres, puis reviennent, se mêlent, s'emmêlent, et c'est sur « Pariposa » que l'issue de cet étrange voyage se dévoile enfin, couplet-refrain, (toutes proportions gardées) nous font descendre, en douceur, alors que nous été bousculés tout le long du trajet. C'est épuisés et confus que nous posons enfin nos bagages car le voyage fût chaotique et sans escale, mais Steve Dalachinsky a beau m'avoir raconté une histoire à laquelle je n'ai rien compris, il l'a fait avec une telle conviction qu'elle m'a embarquée et convaincue. Quant aux aux Snobs, groupe français qui prouve une fois de plus que la scène française, pour peu que l'on s'y intéresse un minimum, se porte bien, ils accompagnent à merveille ce poète à la fois stellaire et urbain, comme rares savent encore le faire. BAM BALAM RECORDS défriche et apporte une nouvelle pierre à l'édifice, certes fragile, d'une scène avant-gardiste qui survit encore et toujours et ce malgré un manque de lisibilité toujours un peu plus grandissant.

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